Présidentielle en Tunisie : la joie de la foule à Tunis contraste avec le visage impassible du nouveau président
C’est plus qu’une victoire. C’est un triomphe. Pour ne pas dire un plébiscite. Au vu des sondages de sortie des urnes, Kaïs Saïed l’emporterait avec 72,53% des suffrages, contre 27,47% à Nabil Karoui. Il est évidemment difficile d’analyser à chaud un résultat qui n’est pas encore officiel. D’autant plus que ce scrutin opposait deux personnalités très éloignées l’une de l’autre et souvent jugées, à tort ou à raison, comme “hors système”. Une constante revient cependant souvent dans les analyses. Comme celle du quotidien francophone La Presse qui observe ainsi, dans son édition du 14 octobre, que “le scrutin présidentiel a marqué un grand retour des jeunes électeurs, qui semblent avoir boycotté les précédents rendez-vous électoraux”. Une observation que franceinfo Afrique a pu faire avenue Bourguiba à Tunis après l’annonce des résultats.Une marée humaineLes jeunes, effectivement, étaient très nombreux dans les joyeuses marées humaines devant le beau théâtre municipal Art déco et au bout de l’avenue, vers la statue équestre de Bourguiba, le “père” de l’indépendance tunisienne (1956). Des jeunes se promenant, se congratulant, dansant, chantant, au milieu des familles avec des enfants… Beaucoup de femmes avaient la tête découverte. Mais beaucoup d’autres portaient un foulard. A un moment, on a pu apercevoir trois hommes barbus et en djellabah, dont l’un criant “Allou Akhbar”. Faut-il y voir là un lien avec le soutien apporté à Kaïs Saïed, très rapidement après le premier tour, par la formation d’inspiration islamiste Ennahdha ? De son côté, l’éditorial du Monde, mis en ligne le 14 octobre, évoque “le conservatisme moral et religieux revendiqué” de Kaïs Saïed.
Le vainqueur de l’élection est évidemment très entouré et acclamé. Il se tient très droit. Tandis que les photographes le mitraillent, empêchant leurs consœurs et confrères d’approcher le nouvel élu. Dans un coin, près de l’entrée de la salle, une dame, intimidée, presqu’un peu apeurée, se tient en retrait, veillée par un soldat en sueur : la (apparemment) très discrète épouse de Kaïs Saïed, Ichraf Chebil…Kaïs Saïed commence son allocution en arabe, qui va durer une dizaine de minutes. L’homme remercie. Il emploie avec force les mots et expressions “intégrité”, “honnête”, “nouvelle Tunisie”, “le peuple”, “ouatann” (pays, patrie…), qui reflètent les propos tenus pendant sa campagne. Il donne presque l’impression d’ânonner, son discours. Il le fait mécaniquement, sans émotion, le visage fixe, face à la caméra. Ce n’est sans doute pas pour rien qu’on l’a parfois surnommé… Robocop. Même s’il est aussi décrit par ses étudiants comme “attentionné”. Etrange personnage, en tout cas, pour celui qui ne le connaît pas…
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